Pour les rencontres des cépages modestes, organisées par l’association du même nom, direction Saint-Côme-d’Olt où nous étions les 5 et 6 novembre derniers. Un programme dense nous attendait. Voici un résumé des moments forts de ces 11e rencontres.
On commence par les actualités concernant l’ambitieux programme CepAtlas, par Jeanne Yerre. Mis en ligne le 30 juin dernier, CepAtlas constitue une banque de données unique sur la connaissance des cépages. Suivant le catalogue officiel des variétés cultivées en France, et donc en complément de Pl@ntgrape, histoire, géographie, sémantique et sources bibliographiques sont traitées pour chaque cépage. Une visite de l’atlas s’impose : https://cepatlas.huma-num.fr/
Cette année, les porte-greffes étaient le sujet de la table ronde animée par Anne Déplaude. Jean-Michel Boursiquot (professeur honoraire d’ampélographie), Taran Limousin (IFV – Institut Français de la Vigne et du vin), Françoise Vannier (géologue à ADAMA), et Sébastien Julliard (directeur du conservatoire du vignoble charentais) y participaient. Les interactions terroirs – cépages – porte-greffes sont abordées. Retenons que sur les 31 porte-greffes autorisés en France, 10 sont importants et 5 (SO4, 110 R, 3309 C, Fercal, Gravesac) représentent 75 % du vignoble français.
Marceau Bourdarias est arboriste et formateur, notamment sur la taille douce pour les vignes. Les techniques de taille préconisées consistent à adapter sa taille en respectant la nature lianescente de la vigne. Sont nécessaires quelques rappels en physiologie végétale pour la vigne comme l’acrotonie, soit un débourrement plus précoce et une croissance accrue sur les yeux situés à l’extrémité des rameaux : une liane, ça grimpe ! Marceau bouscule les certitudes quant à la taille, par exemple la formation d’une rotation des plans phyllotaxiques (disposition des feuilles et des rameaux) où l’on maîtrise la croissance de la vigne sans contrarier sa nature biologique. L’objectif est de limiter, entre autres, les plaies de taille, la propagation des maladies du bois et d’assurer la pérennité du cep.
Après un tour d’horizon du vignoble de la haute vallée de l’Orb par André Deyrieux, Éric Pailles, vigneron à Joncels (34) nous présente l’histoire de son domaine. La description d’Éric insiste sur une parcelle plantée avant la Première Guerre mondiale où Jean-Michel Boursiquot, Thierry Lacombe, Olivier Yobrégat ont identifié 21 variétés. Citons-en quelques-unes : le Morrastel N, le Grand noir de la Calmette N (Petit Bouschet x Morrastel), l’Aramon N, l’Aramon gris G, l’Œillade noire N, l’Alicante Henri Bouschet N (Grenache x Petit Bouschet), le Petit Bouschet N (Aramon x Teinturier du Cher), le Rivairenc gris G ou encore le Dabouki B. La cuvée « Aqueste Còp » assemble les cépages de cette parcelle.
Nous terminons sur la présentation de quelques domaines dont le régional de l’étape, Pierrick Mousset à Entraygues-sur-Truyère, qui cultive sur les coultades (terrasses des versants abruptes du Lot et de la Truyère) Chenin, Mansois (Fer) et Cabernets. Puis focus sur le Domaine Ampelhus (situé non loin de la Petite Camargue) avec Jenia Vasiljeva et Thibaud Vermillard et leurs nombreuses cuvées de cépages rares. Enfin, Montse Comas Carles nous parle du Mas Molla. Situé dans les écarts de Calonge (province de Girona, Catalogne), le Mas Molla a son vignoble surplombant la Costa Brava. Une quinzaine de cépages y sont complantés. Une des deux cuvées dégustées est un « picopola moscatella », cépage blanc autochtone vinifié au domaine pour la première fois.
Question dégustation, il serait bien long de tout évoquer mais voici dix cuvées que nous avons bien appréciées :
- David Barrault, Domaine de Tire Pé, 33 190 Gironde-sur-Dropt.
VDF, « L’échappée » 2019, vin rouge élevé en jarre, assemblage de Castets N (Gros Cabernet x Camaraou noir) et de Mancin N, cépages rares présents dans le vignoble bordelais et probablement originaires de cette région. - Mireille Remaury et Philippe Lelong, Le Pech d’André, 34 210 Azillanet.
VDF, « Lutz » 2020, Bourboulenc blanc (avec 10 % de Macabeu). Blanc de macération (vin orange), 3 semaines de macération. - Famille Barrot, La Sousto, 84 230 Châteauneuf-du-Pape.
AOC Châteauneuf-du-Pape, 2016, 100 % Vaccarèse, cépage noir connu sous le nom de Brun argenté N. - Philippe et Alexandre Gendrier, Domaine des Huards, 41 700 Cour-Cheverny.
AOC Cour-Cheverny, « Eugène Magloire » 2014, Romorantin. - Thierry Navarre, 34 460 Roquebrun.
VDF, Vin d’Œillades 2021, vin rouge issu de l’Œillade noire N. - Anne & Pierre-André Déplaude, Les Déplaude de Tartaras, 42 800 Tartaras.
IGP Collines Rhodaniennes, « Au fil du temps » 2021, un pur Chouchillon, cépage blanc de la vallée du Gier. - Éric Pailles, Domaine de Gravezon, 34 650 Joncels.
VDF, « Cachotterie » 2021, 100 % Villard blanc, hybride interspécifique également nommé 12 375 Seyve-Villard. - Jenia Vasiljeva & Thibaud Vermillard, Domaine Ampelhus, 34 400 Lunel-Viel.
VDF, « Counoise » 2021, vin rouge issu de la Counoise N. - Bia blanc (Bia B), un blanc sec, expérimental, que Taran Limousin nous a fait déguster. Les raisins proviennent des vignes de Philippe Grisard (73 800 Cruet).
- Conservatoire du vignoble charentais, 16 370 Cherves-Richemont : Pineau des Charentes expérimental, 100 % Chauché gris (Trousseau gris G). Le Chauché/Trousseau (noir, puis sa mutation grise) était assez répandu en Aunis, Poitou et Saintonge jusqu’à ce que la production d’eau-de-vie domine l’économie viticole en Poitou-Charente.